Une heure et demie du matin, je viens tout juste de finir mon rapport hebdomadaire et je m’apprête à dormir, quand mon téléphone vibre soudainement et tombe du lit à cause d’un message.

J’ouvre pour regarder : Lao Chen a envoyé sept ou huit messages vocaux dans le groupe, chacun de plus d’une minute. Mon cœur fait un bond — après tant d’années en tant que conseiller en gestion d’actifs, recevoir une rafale de messages en pleine nuit n’annonce jamais rien de bon.

Et effectivement.

La voix de Lao Chen tremblait : « Frérot, c’est fini, les 3 millions pour les études de mon fils l’an prochain… J’ai demandé à ma femme de suivre exactement les étapes que j’avais écrites, et maintenant il ne reste plus un centime dans le portefeuille… »

Je suis instantanément réveillé. Au fil des ans, j’ai traité pas mal de cas, pas trop ni trop peu ; quand il s’agit de pertes dues aux marchés, je peux toujours rassurer en parlant de la logique des cycles. Mais à chaque fois que ça touche à des fonds pour l’éducation ou pour la santé — de l’argent vital — je me sens impuissant et frustré.

Sans attendre qu’il finisse, je pose directement la question fatale : « Tu as pris en photo cette suite de 12 mots ? Ou tu l’as envoyée sur WeChat ? »

Silence au bout du fil.

Un silence plus douloureux que des pleurs.

J’ai fini par reconstituer la vérité : le mois dernier, Lao Chen était en déplacement. Craignant que sa femme ne sache pas comment faire, il a pris une capture d’écran des 12 mots-clés, les a numérotés et envoyés dans le groupe familial, ajoutant même une vidéo « tutoriel idiot-proof » toute gentille. Sa femme a ouvert le portefeuille en suivant la vidéo, et en trois minutes, les six actifs ont été transférés jusqu’au dernier centime. Appeler le service client ? Réponse : « Opération réalisée par l’utilisateur, le système n’a pas l’autorisation de récupérer les fonds. »

Après l’appel, je suis allé consulter le rapport d’un organisme de sécurité. Les chiffres donnent la chair de poule : dans les cas de perte d’actifs, plus de 70 % sont dus à des erreurs humaines, et n’ont rien à voir avec des attaques high-tech ou des failles système.

Beaucoup pensent qu’il faut des compétences techniques avancées pour protéger ses actifs, alors qu’en réalité c’est tout le contraire : ce sont souvent les petits gestes « pour se faciliter la vie » qui sont les plus fatals.

Faire une capture d’écran ? L’envoyer à un proche ? Sauvegarder sur le cloud ? Chacune de ces attentions en apparence anodines peut en réalité devenir un piège pour vos actifs.

Ceux qui arrivent vraiment à protéger leurs actifs ne comptent jamais sur la chance, mais sur le fait de transformer quelques principes simples à en mourir d’ennui en habitudes aussi naturelles que manger ou boire.